Thèses soutenues
Année de soutenance : 2020 - 2019 - 2017 - 2014
2020
Le tabularium civique et militaire. Matérialité et fonctions d’un édifice d’archives de l’époque romaine
Julien Adam, sous la direction de Julian Richard (UNamur)
Dans le monde romain, la pratique archivistique fut à l’origine de la création d’un édifice nommé tabularium. Les témoignages littéraires et épigraphiques donnent un aperçu général de ses fonctions, à savoir la gestion et la conservation d’actes officiels produits à divers niveaux de l’administration civile et militaire. Le tabularium, en tant qu’édifice cette fois, apparait quelquefois au détour d’anecdotes, de discours, ou d’inscriptions. Ces dernières gardent également le souvenir de plusieurs centaines de fonctionnaires, établis à Rome ou dans les provinces, dans des contextes aussi variés que les cités, les bureaux de procurateurs provinciaux, les stations de douanes, les mines, les carrières ou encore les camps militaires. L’étude du tabularium est dès lors intrinsèquement liée à celle des archives du monde romain, longtemps restées l’apanage des philologues et des épigraphistes qui n’abordèrent que très peu la question de leur matérialité. En particulier, les propriétés architecturales du bâtiment demeurent mal connues et rares sont les sites où il peut être identifié de manière franche et nette. L’objectif de cette recherche est de fournir aux archéologues, par le biais d’une méthodologie interdisciplinaire, les clés nécessaires pour identifier les espaces de ce type sur le terrain, mais aussi de déterminer de façon plus précise ses fonctions dans les divers contextes envisagés. L’étude se décline en trois volets : la ville de Rome, le tabularium civique en Italie et dans les provinces de l’Empire et, les tabularia établis dans les camps militaires permanents.
2019
De la mine à l’habitat : Économie des productions minières du Bassin de Mons au Néolithique. De la fin du 5e millénaire à la fin du 3e millénaire
Jean-Philippe Collin, sous la direction de Laurence Burnez-Lanotte (UNamur) et François Giligny (Paris 1)

L’acquisition de ressources lithiques constitue un aspect fondamental de l’économie des communautés préhistoriques. L’identification des gites et l’étude de la circulation des productions représentent dès lors une opportunité unique pour les archéologues d’appréhender les stratégies de gestion des industries lithiques et, par le biais des réseaux d’échanges, la structuration territoriale des communautés humaines et les rapports qu’elles entretiennent entre elles. À ce titre, l’émergence de nombreux sites spécialisés dans l’extraction de silicites, agencés en « complexes miniers », à partir de la seconde moitié du 5e millénaire est révélateur des profondes transformations qui affectent les sociétés agropastorales du continent, et que traduit le concept de chalcolithique européen.
Afin d’appréhender ces transformations socio-économiques et leurs évolution jusqu’à la fin du 3e millénaire, l’auteur a choisi la région de Mons (Hainaut, Belgique) comme cadre d’étude. Il s’agit en effet d’une unité géostructurale cohérente au sein de laquelle près d’une dizaine de sites d’extraction forment le complexe minier du Bassin de Mons, dont le site emblématique des minières de Spiennes.
La caractérisation des silex régionaux avec le concours de la pétro-archéologie moderne combinée à l’apport de la spectrométrie sur plasma induit par laser (LIBS), l’étude des productions des sites miniers et celle de la circulation des artefacts dits « miniers » permettent de préciser les stratégies d’acquisition-production des ressources lithiques par les communautés agropastorales environnantes selon une approche diachronique.

Ce sont ainsi des relations d’une complexité jusque-là insoupçonnée entre les sites miniers qui sont mises en évidence. En effet, une dichotomie forte est établie entre les sites d’extraction d’importance régionale (sites mineurs) d’une part, et, d’autre part, les sites qui connaissent un rayonnement extrarégional (sites majeurs). Ceux-ci, lieu d’une véritable spécialisation économique et technique dont témoigne l’ampleur de la production de grandes haches et les grandes lames, sont partiellement organisés entre eux. Cette recherche démontre que les sites miniers majeurs constituent un élément structurel de l’économie lithique, dont le brusque développement s’inscrit dans le cadre d’une hausse de la pression démographique et de l’occupation rapide de nouveaux territoires à partir de 4200 avant notre ère.
Enfin, loin de se restreindre à une vision techno-économique, c’est également la fonction sociale et culturelle des artefacts miniers, dont certains circulent jusqu’à plus de 200 km de distance, qui est discutée, de même que le rôle fondamental de certaines communautés néolithiques qui apparaissent désormais contrôler l’accès à des gîtes de silex et sont spécialement investies dans leur exploitation.
2017
Le décor sculpté des supports de l'architecture gothique en vallée mosane. Analyse des formes et des techniques pour une approche renouvelée du chantier médiéval
Aline Wilmet, sous la direction de Mathieu Piavaux (UNamur)

Un renouvellement méthodologique
En Belgique, le décor sculpté a fait les frais d’une histoire de l’architecture longtemps demeurée cloisonnée dans une conception régionaliste, probablement faute de recherches récentes permettant de s’en émanciper véritablement. En effet, dès les premières études consacrées à l’architecture gothique en Belgique, le chapiteau dit « mosan », caractérisé par l’emploi du calcaire de Meuse et par une ornementation de « feuilles de plantain », est envisagé en tant que marqueur stylistique caractéristique de l’architecture de la région. Hissé au titre de critère de définition de l’architecture, le chapiteau sculpté mosan demeurait ancré dans un immobilisme scientifique qui n’a été ébranlé qu’en 2017, dans le cadre d’une thèse de doctorat FNRS menée à l’Université de Namur. Cette recherche, basée sur le dialogue entre analyses archéologique et typologique de l’ornement, avait pour objectif d’en renouveler l’approche au regard des méthodologies actuelles, et particulièrement de l’archéologie du bâtiment. Cette méthodologie a débouché sur la mise au point d’une nouvelle lecture des formes, émancipée de la traditionnelle approche fondée sur la définition de la flore architecturale gothique. La description typologique, menée au moyen d’un vocabulaire précis, permet d’identifier les différentes formes popularisées en vallée mosane, ainsi que leur répartition géographique et chronologique. Conjointement à cette approche, l’analyse archéologique de l’ornement sculpté, au travers de l’enregistrement de données métriques, des traces d’outils, des marques lapidaires et des tracés préparatoires, favorise une meilleure compréhension des procédés de façonnage réservé à l’ornement et, dans une perspective plus large, du chantier de construction.
Un outil de datation et de compréhension d’une chaine opératoire
L’analyse approfondie des chapiteaux sculptés a mis en évidence plusieurs adaptations techniques et formelles observées entre le XIIIe et le XVIe siècle : transformation du profil de la corbeille devenant de plus en plus angulaire au fil du temps, évolution dans la sélection de l’outillage privilégié, stylisation progressive du feuillage et accentuation du modelé de ce dernier, fluctuation du niveau d’implantation de la corolle végétale sur la corbeille. Ces indices peuvent servir de critère de datation en l’absence de donnée historique ou de charpentes médiévales. Les évolutions observées sur le décor entre le XIIIe et le XVIe siècle témoignent également de la simplification des procédés et des formes pour optimiser le mode opératoire dans une volonté de rentabilité ainsi que pour faciliter la diffusion des modèles, particulièrement entre le XVe et le XVIe siècle, période de forte activité constructive dans la région.
2014
Vierges à l’Enfant des Pyrénées-Orientales. 1200-1400
Corinne Van Hauwermeiren, sous la direction de Michel Lefftz (UNamur)
Durant de longues années, la sculpture mariale des Pyrénées-Orientales a été étudiée à l'aune d'une historiographie plus descriptive qu'analytique. La majorité des ouvrages s'intéresse aux sculptures du point de vue iconique et à leur appropriation. La désignation de quelques Vierges comme « chef de file » impliquait d'emblée une relégation de beaucoup d'autres Vierges au rang des oubliées. Les principales Vierges publiées sont celles qui portent la marque de l'art roman ou qui sont inscrites dans ce que Mathias Delcor a qualifié de « tradition romane » alors qu'elles présentent toutes les caractéristiques de l'art gothique. Face à cette carence stylistique et technique, cet ouvrage propose d'utiliser l'apport des méthodes d'examens de laboratoire à la connaissance des techniques de mise en oeuvre des Vierges à l'Enfant du département et de renouveler les analyses techniques et stylistiques sur base de méthodologies récentes afin de réévaluer la chronologie de l'ensemble du corpus. Les analyses des essences de bois ont également permis de proposer de nouvelles pistes de recherches quant à l'impact de la gestion forestière sur l'usage des bois.